CANNES 2023 : AUGURE
Premier film de son pays à être présent en sélection officielle (Un Certain Regard) Augure de Baloji est une révélation. Il est de ces films qui imposent immédiatement un cinéaste. Soyons précis : Augure n’est pas un film fantastique, mais une oeuvre sur le rôle que jouent le fantastique et le surnaturel dans certaines croyances et traditions. Nous suivons plusieurs personnages parmi lesquels Koffie (Marc Zinga), jeune homme d’origine congolaise ayant fait sa vie professionnelle et personnelle en France, avec sa compagne Alice (Lucie Debay). Alors qu’ils s’apprêtent à accueillir leur premier enfant, ils se rendent tous deux en RDC afin de s’acquitter, ainsi que le veut l’usage, de leur dot. Koffie présente donc sa femme, blanche, à sa famille, et, alors qu’il doit faire face à leur désapprobation, est soudain perçu par eux comme un sorcier revenu les couvrir de malédictions. Augure est une oeuvre fascinante car multiple. En 1h30, Baloji brosse un portrait total et vertigineux de son pays, autant dans sa réalité la plus crue que dans ses visages mystiques. Le réel et le fantasmagoriques s’entremêlent à l’écran, ainsi que le font le rationnel et l’occulte dans l’esprit des habitants. D’une inventivité folle, la mise en scène de Baloji se réinvente constamment, passant d’une séquence à l’autre du documentaire à quelque chose tenant de la fresque épique, à l’iconographie médiévale-fantasy. Le cinéaste a par ailleurs l’audace espiègle de garder secret certaines facettes des éléments et évènements qu’il filme. On sort d’Augure passionné, subjugué par la sincérité et l’originalité du geste. Il n’est hélas pas en compétition, mais il a tout de même notre Palme d’Or.
Jérémie ORO