LA RIVIÈRE MAUDITE
L’esprit de la Nature
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(Upurga). Lettonie. 2021. Réal.: Ugis Olte. Scén.: Ugis Olte, Bojana Babic et Lucas Abrahao. Prod.: Uldis Cekulis. Photo : Valdis Celmins. Mus.: Reinis Sejans. Mont.: Gratis Belogrudovs. 1h25. Avec : Igors Selegovskis, Inga Tropa, Rihards Sniegs. (Amazon).
Un groupe d’influenceurs, aidé d’un guide, se rend en forêt pour faire du rafting et enregistrer une publicité pour des saucisses végétariennes. Mais, le tournage ne va pas se dérouler comme prévu et la petite bande va vivre un véritable cauchemar…
Les films fantastiques lettons ne sont pas nombreux. Raison de plus pour s’intéresser à cette Rivière Maudite, premier long-métrage de fiction d’Ugis Olte, réalisateur jusqu’ici spécialisé dans le documentaire. Et le résultat mérite le détour tant Upurga (le titre en v.o.) s’impose comme une œuvre aussi angoissante que singulière. En dépit d’un budget que l’on imagine modeste, Olte parvient en effet à mettre en scène de manière remarquable cette histoire mariant thriller psychologique et folk horror. Le film débute de manière laissant penser qu’il empruntera les sentiers du found-footage avant de revenir à une narration plus classique. Rapidement, Andrejs, le guide, dévoile une personnalité tourmentée qui sème quelque peu le trouble au début du récit. D’ailleurs, un mystère semble entourer la plupart des protagonistes, un mystère que le cinéaste parvient à entretenir pendant toute la durée de la projection. Injectant une dose d’humour au détour des dialogues, Olte réussit surtout à tirer profit des formidables décors naturels de Lettonie pour façonner une atmosphère réellement inquiétante. La Nature, ici, semble renfermer un effroyable secret qui va conduire le petit groupe d’influenceurs aux portes de la folie. Le réalisateur introduit le fantastique par petites touches laissant, de la sorte, planer une menace palpable sur ses héros. À partir du moment où Andrejs perd le reste de la bande, le suspense se fait de plus en plus pesant jusqu’au dénouement, quasi expérimental et évoquant le cinéma de David Lynch, qui déroutera plus d’un spectateur, le cinéaste laissant le soin au public de se faire sa propre interprétation. Soutenue par une distribution convaincante, La Rivière Maudite s’impose, au final, comme une réussite et marque la naissance d’un cinéaste dont on attend avec impatience la prochaine incursion dans le domaine de la fiction.
Erwan Bargain