GODZILLA x KONG : LE NOUVEL EMPIRE : NOTRE AVIS, par Jean-Pierre Andrevon
Godzilla x Kong : Le Nouvel empire, signé cette fois encore par Adam Wingard, se veut la suite du précédent trois ans après. Mais cette nouvelle rencontre entre les deux plus fameux monstres géants de l’Histoire du cinéma doit bien se lire comme «avec» et non pas «contre» (vs/x), les deux créatures, si elles ne sont tout de même pas devenues copines, pouvant si besoin est se retrouver pour une alliance provisoire contre un ennemi commun. Le démarrage du film, cependant, se garde de les apparier, Godzilla étant resté à la surface du globe tandis que le roi Kong a pris ses aises dans le monde intérieur. Comme il serait peu judicieux de les laisser au repos, on les découvre dès l’ouverture en plein affrontement, Godzilla venant débarrasser Rome du Titan, ici une araignée (géante), qui piétinait la ville, tandis que Kong, poursuivi par une horde de féroces carnassiers lupins, les extermine en déclenchant sur eux une avalanche. Après quoi, allant se laver dans un lac, il subit l’assaut d’une créature aquatique serpentiforme qu’il tronçonne proprement avant d’en déguster les morceaux avec gourmandise. C’est alors qu’on retrouve le docteur Illene Andrews (Rebecca Hall), de Monarch, qui a toujours à sa garde Jia (Kaylee Hottle), la petite muette apparue Godzilla vs Kong. Et c’est elle qui, grâce à ses dons cognitifs, détecte d’inquiétante vibrations émanant de la Terre creuse, d’où une plongée dans le monde d’en-dessous permettant à nos explorateurs de retrouver Kong… mais pas que lui.
Ceci mis en place, le film peut fonctionner selon une règle rigoureuse et répétée : la rencontre. Que trouvent sur leur chemin Illene et l’équipe de Monarch ? Le peuple pacifique des Iwis, d’où est précisément issue la petite Jia. Et Kong ? Une tribu de singes rouquins presque aussi grands que lui, dont l’impitoyable et féroce chef, Skar King, veut conquérir le monde du dessus. Et Godzilla de son côté, alors ? Lui qui représente le feu atomique ne peut que se colleter avec le froid, d’abord le cristallin Tiamat (rapidement évacué) dans l’Arctique et, descendu à son tour dans la Terre creuse, le dragon de glace Shimo qui, dirigé par Skar King, a manqué de pétrifier Kong. Ce jeu des doubles va jusqu’à se manifester dans certaines séquences annexes, ainsi de Kong qui, souffrant d’une canine infectée, se la fait extraire par un dentiste animalier, Trapper (le nouveau-venu Dan Stevens) qui, alors que le bras droit du gorille est en piteux état suite à sa rencontre avec Shimo, revient pour le doter d’un membre mécanique.
La seconde caractéristique du métrage est son usage de références tous azimuts. Si l’on peut passer rapidement sur le concept de la Terre creuse, qui vient des romans d’Edgar Rice Burroughs et qu’on atteint par un appareil perçant la croûte terrestre, les emprunts sont patents dès la première séquence de l’araignée écrabouillée par Godzilla, ici nommée Scylla alors que c’était Kumonga chez Honda, de chez qui on retrouve aussi, mais ce n’est pas la première fois et ici sans grande nécessité, Mothra arrivé d’on ne sait où. La filiation la plus évidente reste bien évidemment l’apparition du «petit» Suko, issu de la tribu de Skar King et qui devient non sans mal, car il se montre singulièrement hargneux, le fils par emprunt de Kong dépourvu à jamais de femelle, apportant au métrage à la fois ses intermèdes comiques et aussi un peu de tendresse. Au final qu’apporte cette seconde mouture ? Peu de choses certes au seul niveau d’un scénario qui semble n’avancer que pour permettre les affrontements successifs des dajikaijû eiga, toujours impressionnants, et où plane le souvenir des divers Jurassic Park et autre Jurassic World, avec une équipe d’explorateurs lambda où Dan Stevens remplacerait Chris Pratt et où ne manque ni le Noir quelque peu froussard (le poadcasteur Bernie interprété par Brian Tyrie), ni le comparse dont le rôle est de se faire tout de suite dévorer. Néanmoins, si l’esprit peut se heurter à trop d’imprécisions et de coïncidences, le plaisir des yeux est intact, alimenté par ces paysages magnifiques parcourus en longs travellings aériens et tournés à Gold Coast en Australie, et le soin apporté aux divers protagonistes animaliers, en vedette King Kong au mufle remodelé pour faire ressortir son humanité. Loin du montage hystérique qui saccageait notamment la version de Michael Dougherty, le filmage fluide de Wingard permet de s’attarder sur chacune des créatures en action, Kong bondissant de ravin en ravin, le même traversant un gouffre sur la herse d’un immense squelette, ou cette rencontre finale l’opposant, à cheval sur la crête de Godzilla, au dragon Shimo que monte Skar King, les deux monstres se précipitant au ralenti l’un contre l’autre. Du beau travail, seule question restant en suspense : que pourrait-il bien arriver après ? On peut supposer que l’avenir nous le dira.
voir entretien dans le dernier numéro (paru) de l’EF reboot
(Godzilla x Kong : The New Empire ). USA, 2024. Réal.: Adam Wingard. Scén : Terry Rossio, Jeremy Slater, Simon Barrett. Prod.: Mary Parent, Alex Garcia, Eric McLeod, Yhomas Tull, Brian Rogers. Photo: Ben Seresin. Musique: Antonio Di Iorio, Junkie XL. Montage: Josh Schaeffer. Décors: Tom Hammock. Effets. Visuels.: Alessandro Ongaro. 1h55. Avec : Rebecca Hall, Brian Tyree, Dan Stevens, Kaylee Hottle, Alew Ferns, Fala Chen, Rachel House, Ron Smyck.
Sortie aux USA : 29 mars 2024. Sortie en France : 3 avril 2024